Mon tragique cauchemar

Nouvelle écrite par Voiceofcloud


Je ne sais pas exactement où tout a commencé, mais je sais seulement que ma vie a pris un nouveau sens dès cet instant-là. Je ne voulais plus voir la réalité. La vérité était trop dure à accepter. Je suis donc partie de chez moi. J'ai quitté ce monde où je n'étais rien. Seulement avec quelques billets de banque et des vêtements qui me tenaient trop à coeur pour m'en séparer, j'ai quitté ma demeure. Ce chez-moi que j'aimais tant, mais qui ne me donnait rien en retour. Depuis quelques années, tout était mort dans ce lieu qui avait jadis été le plus chaleureux des foyers de la province. Je ne sais plus quand tout a chaviré, mais je crois que cela a éclaté lors du suicide de ma soeur. Petite soeur que j'adorais tant... C'est mon frère cadet qui l'avait retrouvée, étendue sur le sol de la cabane que notre père nous avait construite lorsqu'on était tous trop jeunes pour se soucier de la vie. Mon pauvre jeune frère... Il n'est plus le même depuis cette découverte macabre. Il n'avait que six ans à ce moment-là, quand il a vu notre chère soeur dans une mare de sang. Que j'aurais aimé ne jamais avoir à supporter que ma famille se détériore. Après l'enterrement de Cassandre, elle n'a jamais repris l'apparence heureuse qu'elle avait semblée donner aux autres gens du quartier. Thierry est devenu muet, le regard toujours dans le vague. Il a eu un choc nerveux qui a duré plus d'un an. Mes parents ont été voir un médecin et ce dernier ne leur a jamais donné d'autres explications que celui mentionner plus haut. Quant à mes parents, ma mère avait fait une grosse dépression et avait arrêté de travailler un moment. Mon père avait quitté la maison durant quelques mois pour y revenir plus malheureux qu'avant son départ. Tout le monde se sentait coupable de ne pas avoir remarqué la détresse de Cassandre et cela nous séparait de plus en plus jour après jour. Moi, après un an dans ce monde de cauchemar, j'ai pris la décision de partir. C'en était trop pour moi, je n'en pouvais plus. Donc, mon plan était simple, c'était de quitter ma demeure sans que cela ne paraisse trop. De manière élégante, naturelle. Le lundi avant mon départ, je suis allée retiré de l'argent dans mon compte. La caissière m'a demandé ce que je voulais faire avec tout ce fric et j'ai rit pour apaiser l'atmosphère. Je lui ai menti en disant que j'avais des dettes à rembourser à beaucoup de mes amis et que ces derniers aimaient mieux le liquide. J'ai également rajouté que je devais aller faire quelques courses avant de retourner chez moi. Elle a tout avalé ce que je lui racontais et j'en étais fière. Je suis retournée à la maison, j'ai serré quelques affaires importantes à mes yeux dans mon sac à dos et dans un autre sac que j'apporterais avec moi, puis je les ai cachés en-dessous de mon lit. Au même moment, j'ai eu un appel téléphonique. J'ai été répondre et j'ai été surprise de me rendre compte qu'il s'agissait du garçon qui devait m'aider à exécuter ma fuite. Il m'a longuement expliqué comment on allait procéder. Je l'ai écouté avec une attention délibérée. Je prononçais chaque mot qu'il me disait, silencieusement au fond de mon âme. Quand on a raccroché, je me suis dépêchée d'aller dans ma chambre et je me suis couchée. J'ai dormi, mais mon sommeil était agité comme il l'avait rarement été auparavant. Enfin, quelques jours après cet appel, je me suis retrouvée à aller voir mes copains souvent pour leur dire adieu sans qu'ils ne s'en rendent compte. J'aurais bien voulu leur dire que je quittais ce lieu de cauchemar, mais cela était trop risqué d'après moi. Ils auraient voulu me supplier de rester, ils auraient voulu me retenir. J'en suis certaine. Bref, même à ma meilleure amie, je ne lui en ai rien dit. Elle avait l'air si heureuse de me voir ce mercredi-là, tellement joyeuse de savoir que je dormais chez elle cette nuit-là. C'était une sorte de cadeau que je lui faisais avant de partir à l'aventure. Peu importe, le vendredi soir de mon départ, j'ai dit à mes parents que j'allais encore chez Isabelle pour écouter des films, manger du pop corn... Je leur ai dit que je passerais probablement toute la fin de semaine là. J'ai bien pensé aux risques que mes parents me contactent là-bas, mais habituellement, ils ne me téléphonaient pas chez mes amis, à moins qu'il y ait urgence. Cela n'est jamais arrivé depuis la mort de Cassandre, donc je restais confiante face à mon plan. Et, j'ai aussi réfléchi à l'idée que Isabelle pouvait m'appeler, cela était plus difficile à contrer, car elle me contactait souvent durant la fin de semaine pour prendre de mes nouvelles. Je lui ai donc téléphoné et je lui ai dit que je partais pour le week-end dans le sud avec Joachim et Mardy, deux amis que Isabelle n'appréciait pas beaucoup. Elle m'a souhaité un bon voyage et mon problème était clos. Personne d'autre n'essaierait de me contacter à moins d'une malchance énorme. En tout cas, ce vendredi-là, j'ai embrassé mes parents et Thierry et je suis sortie dehors avec mes bagages. Mon père m'a offert d'aller me reconduire chez Isabelle, mais j'ai refusé, prétendant que j'avais envie de marcher. Il n'a pas insisté et est reparti à l'intérieur se planter devant la télévision. J'ai donc pris le chemin opposé à celui qui se rend chez ma meilleure amie, puis j'ai marché jusqu'à la grande route. Une voiture noire était stationnée dans l'accotement de la rue. J'ai sourit de satisfaction, j'ai marché plus rapidement vers cette bagnole, puis j'ai ralenti le pas en ayant un malaise soudain. J'avais peur, peur de ce qui pouvait m'arriver, peur de tout perdre, peur de me tromper de destin, peur de quitter ce monde de cauchemar pour m'en aller dans le monde de l'enfer et non dans celui de la paix. Je ne savais plus quoi faire, mais je savais que je pouvais encore reculer si je le désirais. Par contre, je ne l'ai pas fait. J'ai continué mon chemin et je suis vite arrivée à l'automobile noire. Je me suis penchée la tête pour voir le visage de l'homme qui était assis au volant, mais je n'ai vu que sa forme, aucune couleur n'y était inscrite. Je me suis demandé si le mien n'avait pas de couleur également dans cette pénombre mesquine qui nous enveloppait tendrement. J'ai ouvert la porte du passager, puis j'ai lancé mes bagages sur le siège de derrière. Il m'a salué et a démarré le moteur de la voiture. On a commencé à rouler sur la grande route, tout était silencieux. Le silence me rendait nerveuse, je n'en pouvais plus de ce stress. Enfin, l'homme a peut-être senti que je ne me sentais pas à l'aise ou peut-être que lui aussi n'aimait pas cette tranquillité, mais il a allumé la radio et de la forte musique a soudainement éclaté dans la bagnole. L'atmosphère s'est détendue et je me suis assoupie.

Lorsque je me suis réveillée, je n'étais plus dans la voiture, mais dans un lit d'une chambre de motel. J'ai bâillé un moment, puis je me suis levée tranquillement du matelas. J'ai examiné les alentours, puis je me suis dirigée vers la salle de bain. La porte était fermée, mais j'ai tourné la poignée et elle n'était pas verrouillée. J'ai donc poussé la porte et je me suis retrouvée face à face avec un jeune homme séduisant à moitié nu. Je l'ai fixé un moment sans bouger, puis je suis finalement sortie de la pièce en bafouillant des excuses. J'étais rouge de honte et de gêne, mais je me sentais tout de même bien. Enfin, j'avais fini par voir qui était mon compagnon de voyage. Puis, il était trop mignon... Ce fait cocasse qui s'était produit m'a grandement été utile, je pense, parce qu'il n'a exercé aucune sorte de domination sur moi par la suite. Il a été plus gentil que je ne croyais qu'il le serait un jour. En réalité, ce n'était qu'un aidant que quelqu'un avait contacté pour moi. Il ne me devait rien, ce type. On était de parfaits étrangers qui dormaient dans le même lit et qui s'assoyaient ensemble dans une pauvre voiture noire délabrée. Bref, lorsqu'il a sorti de la salle de bain, je lui ai sourit timidement et il en a fait autant. Il avait les cheveux noirs courts, les yeux d'un brun presque limpide, des muscles bien développés… Il était parfait physiquement. Il s'est approché de moi et a touché de ses doigts mes cheveux châtains pour ensuite me regarder longuement sans rien dire.
- Bon, Sandrine, c'est ça? m'a-t-il demandé soudainement.
- Oui, c'est ça.
- Moi, c'est Marc. On va avoir du chemin à faire ensemble puisque tu veux fuir ta maison. Mais tu as encore la chance de changer d'idée si tu veux.
- Non, je veux vraiment partir. Je n'en peux plus de vivre là.
- D'accord. Alors, il faut que tu fasses tout ce que je te dirai.
- Ok.
Il m'a sourit, puis il m'a pris la main. Je me suis changée, puis je suis allée prendre ma douche. Plus tard dans la journée, je me suis faite couper les cheveux assez courts et je me les suis fait teindre en noir. Ça faisait très naturel et c'était beau à en mourir. Enfin, je me suis acheté des lentilles cornéennes de couleur, de façon à ce que mes yeux bleus deviennent de couleur brune. Ça faisait étrange de me voir de cette manière, mais c'était beau. On a jeté les vêtements que je portais le jour de ma fugue, puis je me suis achetée quelques autres vêtements pour traverser la frontière. Tous ces changements m'ont bousculée au début, mais enfin, je savais que ça en serait ainsi. Marc m'a serrée dans ses bras, je ne sais pas ce qui lui a pris, mais je ne l'ai pas repoussé. Je ne crois pas qu'une fille l'ait déjà repoussé... Peu importe, je ne voulais pas le repousser moi non plus même s'il exerçait peut-être une certaine force sur moi. Je le voulais pour moi seule, mais je savais que je ne pourrais jamais l'avoir. Il n'était là que pour quelques temps et je le savais bien... Je lui aurais donné mon âme, mon coeur, tout ce qu'il voulait de moi. Je doutais par contre que lui aussi aurait fait également ça pour moi. En réalité, je savais que je n'étais qu'une pauvre aventure pour lui, que je ne serais jamais celle qu'il aimerait. Tout de même, je me suis laissée entraîner dans la nature de ce désir et je lui ai donné presque tout de moi. Tout, mais pas ma confiance en lui. Je ne lui appartiendrais jamais, je ne le voulais pas. Sinon, je savais que j'allais souffrir et personne ne veut habituellement souffrir. Le mal, c'est une douleur trop atroce pour la vénérer à moins d'être un peu fou. Je sais que je n'aurais pas dû lui donner mon coeur, mais je l'ai fait. Je lui ai également donné mon corps quelques jours après avoir traversé la frontière. Et c'est là que je me suis rendue compte que j'avais fait une erreur, car j'étais tombée enceinte. Non, on ne s'était pas protégés et je regrette de ne pas l'avoir fait. Je pense que je ne voulais pas le décevoir ou quelque chose de ce genre. Bof, je l'ai gardé, cet enfant qui grandissait dans mon ventre. Je ne voulais pas m'en séparer, parce que je savais que c'était la seule chose que Marc me donnerait dans sa vie. L'amour, il ne m'en apportait pas, et c'est ce que je désirais de lui. Seulement ça, mais jamais je ne l'aurais. Je le savais depuis le début, mais j'avais fini par espérer qu'il m'en donnerait une bonne journée. Mes espoirs ne se réaliseraient jamais, je l'ai su quelques jours après qu'on soit arrivés en Floride. Oui, je l'ai su là-bas. On était sur le sable chaud, devant notre chambre de motel. J'étais étendue sur le sol, les yeux clos, le corps presque nu à cause du bikini que j'avais sur le dos. Cela ne faisait que quelques semaines que j'étais enceinte et je ne l'avais pas appris à Marc, de peur qu'il me laisse tomber dans ce pays tout à fait inconnu pour moi. Je savais que je ne devais pas lui dire, mais l'envie était trop intense pour que je puisse retenir ma langue. Je m'étais approchée de lui, je l'avais embrassé dans le cou et je lui avais chuchoté la nouvelle dans l'oreille. Il était devenu tout à coup raide comme une barre de métal, puis il m'avait repoussée violemment. Il m'avait jeté un regard dur.
- Quand veux-tu qu'on aille à l'hôpital? m'avait-il demandé.
- Quoi? Qu'est-ce que tu veux dire, Marc?
- Tu ne le garderas sûrement pas, non? Franchement, Sandrine, tu as seulement 16 ans. Je ne te vois pas avec un enfant à cet âge-là.
- Je connais des filles qui l'ont déjà fait...
- Pas question que je reste avec toi si tu veux un enfant. Je t'avertis, je sacre mon camp si tu veux le garder.
- Mais...
- Pas de mais, ok?
- J'ai le droit d'y penser au moins?
- Oui, c'est ok. Mais n'attends pas trop longtemps, car je peux être parti un bon matin si tu décides de ne pas prendre de décision pour te laisser du temps. Moi, je ne suis pas du genre à niaiser et tu le sais.
Il m'avait laissée seule sur la plage, seule comme je ne m'étais jamais sentie. C'était étrange de se sentir comme ça, mais je n'avais pas le choix de rester là. Je ne connaissais rien à la Floride. Je devais prendre une décision rapidement, mais je savais déjà que je le garderais. Je ne voulais pas tuer ce pauvre enfant qui était à l'intérieur de moi. Celui qui avait déjà une âme selon moi. Je lui ai donc menti en disant que je m'étais trompée en fin du compte, que j'étais en retard de quelques semaines et que j'avais seulement sauté aux conclusions trop vite. Il m'a cru, ce con! Bof, j'essayais d'avoir plus de temps pour réfléchir... Je devais trouver le moyen de retourner au Canada. Je voulais retrouver ma famille, peu importe les conséquences de ce que cela occasionnerait. J'ai donc pris mes bagages une nuit de novembre et j'ai quitté Marc, cet homme qui était aussi laid à l'intérieur qu'il était beau de l'extérieur. Je le détestais maintenant, mais en même temps, je l'aimais. Je le détestais parce qu'il ne m'aimait pas et je l'aimais parce qu'il était tout pour moi. Encore une fois, je quittais un lieu de cauchemar et je savais que je m'en retournais vers un autre lieu de cauchemar. Mais j'aimais mieux changer de lieu que de rester dans le même encore une autre journée.

Je me suis ramassée sur une route qui menait vers le Canada et j'ai fait du pouce. Une femme m'a emmenée jusqu'en Caroline du Nord, elle était bien gentille. Elle ne voulait pas que je continue ma route vers mon pays, elle était inquiète. Je lui ai dit que je n'avais pas le choix et elle ne m'a pas retenue. J'aurais dû l'écouter... En tout cas, deux hommes m'ont embarquée dans leur voiture, ils ne me disaient rien de bon. Mais je n'avais pas eu le choix d'embarquer avec eux, personne ne s'était arrêté depuis des heures lorsqu'ils m'ont offert à monter. J'avais les jambes en coton, trop morte de fatigue pour refuser. Peu importe, ils ne m'ont pas touchée, c'était déjà ça. Un moment donné, ils ont arrêté leur bagnole sur l'accotement de la route, où il n'y avait aucune civilisation. J'ai eu vraiment peur, mais ils ne m'ont rien fait. Enfin, façon de parler... L'un est sorti de l'automobile et a entraîné l'autre dehors. Ce dernier criait à pleine voix, se demandant ce que son ami lui faisait. Ce qu'il lui faisait, c'est qu'il était en train de se préparer à le tuer. Moi, je ne réalisais pas ce qui se passait, mais je les fixais, sans réagir. L'homme a pris son revolver et a tiré sur l'autre. J'ai sursauté, mais je n'ai pas bronché. Il s'est retourné vers moi et a sourit. Je lui ai sourit. Il est revenu, m'a signalé de m'asseoir devant, puis il m'a fait inhalé de la drogue. Je n'aurais pas dû accepter, mais j'avais trop peur de ce qu'il pouvait me faire. J'aurais préféré mourir que ressentir la douleur que j'ai eu par la suite. Tout est devenu embrouillé autour de moi, puis noir.

Lorsque j'ai fini par revoir, il n'y avait que des murs blancs autour de moi. J'étais dans un hôpital. Je me suis redressée, puis je me suis levée pour aller me changer. Je me sentais mieux et c'est étrange comme je me sentais parfaitement bien. Sur une chaise se posaient mes bagages, je me suis dirigée vers eux. Au même moment, j'ai entendu du bruit dans le corridor. Je ne voulais pas qu'ils me voient, je suis donc entrée dans la salle de bain. Je suis restée longtemps là, même après qu'une infirmière entre dans la pièce. Elle n'a pas eu l'air à se faire du souci parce que je n'étais pas là. Elle est repartie vite, je devrais dire. Après quelques minutes de silence, je me suis tournée vers le miroir. Étrangement, je ne voyais pas mon reflet dans le miroir. Je me rappelle que j'ai haussé les sourcils et que j'ai examiné le miroir. Je me suis dit qu'il devait être différent des autres, que c'était un miroir typiquement américain. Lorsque je m'apprêtais à sortir de la salle de bain, j'ai entendu des personnes anglaises entrer dans ma chambre, tous énervés. J'ai entendu des bruits étranges, puis ils sont sortis avec autant de bruit. Enfin, quand tout s'est calmé, je suis sortie de la pièce. J'ai senti une lumière flamboyante me refléter dans les yeux, mais je l'ai ignorée. J'ai essayé de prendre mon sac, mais il m'a glissé des mains. Je commençais à stresser un peu, je dirais. En fait, je me sentais tout à fait étrange. J'ai sorti la tête dans le corridor, puis je me suis entraînée dans ce dernier. J'ai rencontré une femme, elle m'a presque foncé dedans. J'ai voulais lui crier de faire attention où elle mettait les pieds, mais aucun son ne sortait de ma bouche. Je ne savais pas ce qui se passait. J'ai été voir une secrétaire et je lui ai demandé en anglais quel jour on était. Elle ne m'a pas répondu. Je me sentais trop vulnérable, je ne savais pas pourquoi tout le monde m'ignorait. Tout à coup, j'ai compris. Je devais rêver, c'était la seule hypothèse plausible. Oui, ou j'étais encore sous l'effet de la drogue. J'ai sourit en me retournant et je me suis ramassée face à face avec un grand jeune homme blond. Il m'a sourit, mais son sourire avait l'air irréel.
- Tu n'as aucune raison de sourire, ma belle, m'a-t-il dit.
- Tu n'as pas plus de raison, je crois.
- Oui, je sais. Mais toi, tu en as encore moins.
- Et pourquoi donc?
- Je sais seulement que tu ignores ce qui t'arrive.
- Je rêve, idiot!
- Non, Sandrine, tu es morte. J'ai vu ton corps passé devant moi il y a quelques instants à peine.
- Hein? Ce n'est pas vrai.
- Je suis mort aussi, ma belle. Ne t'inquiète pas, plusieurs personnes meurent ici... Mais quelques-uns comme toi et moi oublions parfois de quitter ce monde et de voler vers ce royaume de lumière. Ensuite, il n'y a aucun moyen de retourner là où nous devions aller.
- Je ne peux pas être morte...
- Crois-moi, tu l'es. Je le suis. Tu veux voir ton corps? Elle est à la morgue. Mais je t'avertis, ce n'est pas cool voir son propre corps.
- Non, je te crois. Tout s'explique maintenant.
Je le croyais, oui. Parce que c'était vrai, j'étais morte. Ce gars, il était mort depuis près de cinq ans. Il m'a appris plein de choses que les fantômes pouvaient faire. Il se nommait Xénon, nom qu'il s'était lui-même offert après son décès. Il m'a appris à lire dans les pensées, c'était bien. Enfin, il m'a appris à écrire grâce à la pensée... C'est tellement facile avec les ordinateurs, tellement plus facile qu'avec un crayon et une feuille. Bref, c'est ma vie et ma mort. Jamais je ne reverrai mes parents, car je suis condamnée à demeurer sur terre. Au moins, il y a Xénon. Tous les deux, nous ne pouvons pas quitter les limites de l'État. C'est comme s'il y avait une barrière transparente qui nous repoussait jusqu'à l'endroit où nous sommes morts. Ce qui est étrange avec Xénon, c'est qu'il est mort dans la même chambre que moi. Nous sommes devenus amis, maintenant. Il m'a présenté Osery, une fille qui communique avec les esprits. Xénon et moi sommes des esprits pour elle, des âmes en peine. Oui, c'est ce que nous sommes. Peu importe, c'est elle qui remettra cette lettre à mes parents, de façon à ce qu'ils ne puissent jamais retracée la personne qui a écrit cette lettre. Triste sort, ce qui m'arrive, non? Mais j'accepte ce destin, je n'ai aucun choix.



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